Le futur de l’emploi dans les industries mécaniques

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Sous-traitance Par Jérôme MEYRAND Publié le  29/07/2024
Le futur de l’emploi dans les industries mécaniques
Dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre qualifiée, les industries mécaniques doivent s’entourer de nouvelles compétences. (photo Shutterstock)

D’ici 2027, les mécaniciens devront pourvoir des dizaines de milliers de postes chaque année et faire face à des mutations importantes des métiers. L’étude de la FIM souligne les défis de recrutement et de formation pour répondre aux nouvelles exigences du secteur.

Une cinquantaine de milliers de postes seraient à pourvoir chaque année d’ici 2027. Sur la même période, une vingtaine de métiers en tension devraient connaître des mutations importantes. Plusieurs domaines sont concernés :  composition de nouveaux matériaux, évolutions de process exigeant plus de technicité et de contrôle, nouveaux procédés, digitalisation des fonctions ou du fonctionnement, évolution technologique des installations, écoconception, économie circulaire, ainsi que de l’évolution sociétale, incluant de nouvelles attentes des salariés et de nouvelles façons de travailler. C’est ce qui ressort d’une étude de l’Observatoire paritaire de la métallurgie, lancée en 2023, à la demande de la Fédération des industries mécaniques (FIM), laquelle a publié les résultats en juin dernier. Il s’agit d’une étude prospective portant sur le devenir des industries mécaniques en matière d’emploi et de compétences. Celle-ci vient mettre en lumière les perspectives d’embauche, l’évolution des métiers et des formations.

A la question sur ce que seraient les enjeux majeurs pour l’entreprise et son avenir, 79 % des sondés ont affirmé devoir faire face à la pénurie de main-d’œuvre qualifiée, loin devant une autre préoccupation, celle d’accompagner le personnel à acquérir les compétences spécialisées (57 %). Ceux ayant répondu que le principal enjeu était celui de répondre aux attentes des clients ne sont que 44 %, suivi par l’amélioration de la productivité, à égalité avec la diversification de leurs activités et l’intégration de capacités pour capter de nouveaux marchés (42 %), l’intégration des évolutions des normes et réglementations (30 %), l’automatisation de leurs process internes et l’intégration de l’intelligence artificielle (27 %), opérer une transition écologique et décarbonation (22 %) et une transition numérique (11 %).

Inadéquation entre les compétences et les besoins du poste

En interrogeant les entreprises de mécanique sur les raisons des départs de salariés, le débauchage par d’autres entreprises pour un meilleur salaire ou de meilleurs avantages sociaux arrive en tête, avec 22 % des réponses, talonné par l’inadéquation entre les compétences et les besoins du poste occupé (18 %). Plus loin derrière, arrivent les relations interpersonnelles avec les collègues, les supérieurs ou la direction (12 %), les contraintes liées au trajet domicile-travail (10 %) et le sentiment de ne pas s’épanouir dans le rôle ou de ne pas avoir un impact significatif au sein de l’entreprise (8 %).

« Il y a des métiers pour lesquels c’est très dur de trouver [une personne], et l’entreprise ne prend parfois même plus la peine de chercher. Cela prend trop de temps, trop d’entretiens pour pas de résultats », a témoigné un entrepreneur, lors de l’enquête, qui ne dévoile aucun nom dans les propos rapportés. Un autre dirigeant reconnaît que « le recrutement est une question récurrente », et qu’il « manque sur le marché des techniciens bac+2 et des ingénieurs formés (…) ce qui génère une forte bataille avec la concurrence ». Et de reconnaître de faire « appel à des ressources étrangères », en provenance principalement de Tunisie et d’Algérie.

Une autre entreprise assure travailler « fortement » sa « marque employeur et sa notoriété » afin de faciliter le recrutement. Un confrère confie qu’« au-delà des métiers en tant que tel, il faut se concentrer sur l’attractivité du secteur en allant au contact dès le plus jeune âge pour leur faire connaitre l’industrie ».

Agir sur les facteurs de turnover

L’étude prospective de la FIM met en exergue plusieurs préconisations. Par exemple, elle conseille d’agir sur les facteurs du turnover et de fidéliser par le biais de la montée en compétences. Pour compenser l’absence de profils qualifiés, le porte-parole des entreprises de mécanique en France recommande de renforcer l’ouverture à différents types de profils (seniors, personnes éloignées de l’emploi…) ou d’intégrer des candidats présentant des capacités d’apprentissage pour ensuite les former en interne.

Une autre piste est envisagée, celle de développer le numérique, la transition énergétique et écologique, car il s’agit de sujets sociétaux auxquels les jeunes générations sont particulièrement sensibles. « Conjuguer les actions en faveur de la RSE en tant que levier de fidélisation et d’attractivité, ce qui renforce la marque employeur, tout en conservant un modèle économique compétitif », suggère l’étude.

L’Observatoire s’est également intéressé à la formation au-delà du cycle scolaire, notamment en interne, dans les entreprises. Il en est ressorti que 36 % des répondants formaient eux-mêmes leurs salariés sur leurs propres métiers, tandis que pour 21 %, il s’agit de formations liées aux évolutions technologiques internes et aux process. Ils ont également cité les formations sur les outils numériques (19 %), le développement personnel (13 %) et les langues (10 %).

Attirer plus de candidats sur les formations « cœur de métier »

Concernant les points à améliorer sur les offres et les organismes de formation actuels, les entreprises de mécanique ont évoqué l’adéquation entre les parcours de formation et leurs besoins opérationnels (22 %), la baisse du coût des formations (17 %). Ils souhaitent également que l’on puisse attirer plus de candidats sur les formations « cœur de métier » (15 %) et promouvoir les formations de niveau technicien (15 %). Pour d’autres, il faudrait mettre en œuvre des moyens techniques dans les centres de formation et d’enseignement qui soient plus proches de ceux exploités dans les entreprises (15 %). Enfin, il serait essentiel, pour 13 % des répondants, d’améliorer la connexion entre l’enseignement et les entreprises.

Selon les résultats obtenus de ce sondage, la FIM appelle à « maintenir le cap de montée en qualification sur cinq thématiques principales au-delà des formations obligatoires : métiers internes, outils numériques, évolutions technologiques, développement personnel et langues. » Mais aussi à accentuer la collaboration entre les entreprises et les organismes de formation « dans la rénovation des référentiels diplômants ».  Et enfin, la Fédération des industries mécaniques recommande de déployer des dispositifs communs dans un but d’optimiser les coûts.

L’alternance, un bon canal pour recruter et fidéliser

Dans l’enquête de la FIM, la question de l’alternance a également été évoquée : est-elle un bon canal pour recruter et fidéliser votre personnel ? Ils sont 81 % à répondre « oui ». Car ce type de formation participe à apprendre le métier, le travail en équipe, il ouvre l’esprit, et permet d’être opérationnel en fin de parcours moyennant une méthodologie d’accompagnement structurée, est-il ressorti de cette étude. Les personnes interrogées reconnaissent également que cette période d’apprentissage permet « d’évaluer l’adéquation entre le projet initial de l’alternant avec les réalités du métier, et participe à professionnaliser les plus jeunes ». Surtout, l’alternance reste un « canal de recrutement », notamment pour faire face aux départs en retraite, mais aussi un « canal de fidélisation », à condition de favoriser une bonne intégration des nouvelles recrues. L’alternance peut également être vue pour certains comme « un levier de reconnaissance des tuteurs ».

La féminisation dans les entreprises de mécanique est aussi soulevée dans l’étude. On apprend que les femmes représentaient 18 % des salariés en 2021 (contre 17 % en 2017). Dans la métallurgie, le taux était de 23 %. « A l’identique de l’industrie au sens large, les entreprises considèrent la féminisation des effectifs comme une part de réponse aux difficultés de recrutement et mettent en évidence leur souhait d’intégrer des femmes, et ce sur toutes les fonctions », peut-on lire dans l’étude.

De plus en plus de femmes occupent des fonctions stratégiques

Dans quels services retrouve-t-on le plus de femmes dans les industries mécaniques ? Sans surprise, « elles sont classiquement plutôt représentées au niveau des fonctions administratives et supports », montre l’étude, alors que leur présence en production reste encore très faible. « Pour autant, la mécanisation participe à proposer un panel plus large de postes accessibles », suggère la FIM. Et si on rencontre des femmes dans les ateliers, elles occupent des postes de frappeuse à froid, technicienne en fonderie, rectification, technicienne en mécanique et injection. De même, de plus en plus de femmes occupent des fonctions stratégiques (commerce, qualité, R&D en laboratoire, chef d’équipe, responsable production, communication), y compris au niveau des « codir » et « comex » où elles peuvent représenter jusqu’à 50 % des membres, projette l’étude. Si elles choisissent une formation par alternance, elles s’orientent majoritairement vers les formations tertiaires et de vente (56 %), et seulement 32 % d’entre elles se dirigent vers les technologies industrielles, mécaniques, électricité et informatique (conte 76 % pour les hommes), note encore l’étude.

Lors de l’enquête d’avril 2021, la FIM avait pu mettre en évidence le manque de salariés de moins de 30 ans dans les entreprises de mécanique. Ce nouveau portrait sectoriel des industries mécaniques est venu préciser la faible présence des moins de 25 ans au sein des effectifs (6%). Un dirigeant interrogé reconnaissait que la mécanique fait état d’une « moyenne d’âge assez élevée », qui pour lui est le « résultat d’une très grande fidélité », mais avec pour conséquence « un manque de sang neuf, accentué par la difficulté à attirer spontanément du personnel dans ce type d’activité ».

Pyramide des âges

Dans l’étude publiée en avril dernier, les effectifs par tranche d’âge des industries mécaniques se répartissaient, en 2019, de la manière suivante : + 55 ans (16 %), entre 46 et 55 ans (32 %), entre 25 et 45 ans (46 %) et -25 ans (6 %). Interrogées sur la question de la pyramide des âges, 45 % des entreprises mécaniciennes se disent être impactées par les départs en retraite. Cette tendance se répartit à hauteur de 33 % au sein des segments équipements de production, équipements mécaniques, pièces mécaniques issues de la sous-traitance, et 22 % au sein du segment composants et sous-ensembles intégrés. La moyenne d’âge se situe autour des 40-50 ans. La FIM l’explique par une grande ancienneté, en raison de la fidélité des effectifs, un déficit d’attractivité vis-à-vis du public, un décalage assez marqué de compétences avec le besoin réel, un turnover plus élevé des nouvelles recrues au regard des évolutions sociétales.

Enfin, il a été observé que les entreprises qui étaient moins impactées par les départs en retraite avaient anticipé le renouvellement de main-d’œuvre en intégrant des alternants notamment, ou en formant du personnel interne pour assurer le transfert des savoirs et la continuité de service.

Le futur de l’emploi dans les industries mécaniques
Jérôme MEYRAND - Rédacteur en chefFormé aux microtechniques, devenu journaliste en blouse bleue, passé par l’ESJ Lille.

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