Chez Germain Bionic, comment accompagnez-vous vos clients ?
L. D. Nous commençons par la qualification du besoin du client, pour cela nous demandons à nos clients de nous envoyer des vidéos, des photos de leur process, pour se projeter. On va leur demander le poids de ce qui est manipulé et la typologie de mouvement, les répétitions, afin de savoir si notre exosquelette va être pertinent ou non. Ensuite, on va se déplacer sur site afin de présenter notre dispositif, avec la participation du management, des opérateurs. Il faudra déterminer un potentiel référent exosquelette dans l’entreprise. C’est une personne qui est très importante pour que cette technologie innovante puisse être utilisée sur le long terme. Après, on procède à une phase de test, avec un certain nombre d’opérateurs pendant X minutes ou X heures, pour valider que l’exosquelette est compatible avec le process et qu’il offre bien des avantages et soulage bien l’opérateur. Notre exosquelette est équipé de capteurs, qui vont analyser en temps réel le process et l’ergonomie de chaque mouvement. Suite à cette phase de test, on sera capable de dire quels sont les process où notre exosquelette aura réellement un gain, où il va réellement protéger et soulager la personne, et quels sont ceux où notre solution n’est pas pertinente.
Comment bien choisir son modèle ?
Y.G. Je suis en train de terminer la création d’un outil de qualification d’exosquelettes, dans lequel on va trouver sept indicateurs et cinquante critères. Et j’ai déjà qualifié 114 exosquelettes. Dans cet outil de qualification, il y a toutes les caractéristiques techniques des exosquelettes, bien entendu, mais ça c’est un seul indicateur, et moi j’en ai six autres derrières. J’ai des indicateurs de complexité, d’assistance physique, d’utilisabilité, d’utilité objective, de sécurité et de compatibilité. La technologie exosquelette, même si elle a une dizaine d’années, cela reste une jeune technologie. Il y a encore beaucoup à faire.
Comment forme-t-on les salariés à utiliser un exosquelette ?
Y.G. Cela passe par une première prise de contact avec l’exosquelette. Et là, c’est tout l’intérêt d’avoir des fabricants et distributeurs qui adoptent un discours non pas commercial parce qu’on n’est pas là pour vendre mais faire essayer le produit et que ça se passe bien. C’est trouver quelque part une certaine partie de l’adéquation entre le produit et la personne. Une fois que cette phase de découverte est menée, vient une première formation hors situation de travail, pour justement apprendre à le mettre, à le régler, etc. Et après une formation en situation de travail, tout en sachant que quand on rajoute un exosquelette, de toute façon, il y aura une modification du travail, puisqu’on rajoute un élément complémentaire.
La formation chez German Bionic, comment se passe-t-elle ?
L.D. On a une équipe dédiée de formateurs qui prennent le temps d’accompagner l’entreprise et leurs opérateurs. Cela commence par une partie en salle, sans être dans les contraintes d’un atelier ou d’un entrepôt. Il s’agit alors de faire connaissance avec notre exosquelette, de le toucher, de le mettre, de l’enlever plusieurs fois, de trouver ses points de réglage, de confort. Il s’agit déjà de trouver des automatismes, parce que si on le met deux, trois, quatre fois, on crée un automatisme avec le dispositif. Puis, une fois qu’on est à l’aise, on va sur le terrain. Nous recommandons de commencer par de courtes sessions d’utilisation, entre une à trois heures maximums par jour ou tous les deux jours pour créer déjà une habitude, mais il ne faut pas y aller trop fort d’un coup. On va former surtout des référents qui vont devoir connaître par cœur le produit, afin qu’ils puissent intervenir si une personne se plaint d’un inconfort, d’une gêne, d’être trop serrée ou pas assez serrée, d’avoir trop de support, pas assez de support.
C’est déjà arrivé qu’un salarié ne se sente finalement pas à l’aise avec son exosquelette ?
L.D. Cela arrive. Il faut bien se rendre compte que le salarié va se retrouver à devoir travailler comme s’il portait un sac à dos. Et ce sac peut générer un peu de chaleur, du frottement, du poids en plus, jusqu’à gêner certains mouvements. Sauf que ce sac à dos, il peut aussi vous permettre de compenser une partie de votre pénibilité, de votre effort au travail. Il y a des personnes, avec lesquelles vous leur mettez l’exosquelette sur le dos et instantanément elles vont ressentir les bénéfices dans leur travail. Et d’autres qui vont éprouver trop de contraintes, qui vont se sentir gênées.
A quoi ressemblera la prochaine génération d’exosquelette ?
Y.G. On peut tout imaginer. On est au tout début de cette technologie, même si on a énormément progressé en l’espace de cinq ans. L’exosquelette est là pour assister l’humain qui est en train de bouger. Un exosquelette de manutention est un exosquelette qui fonctionne très bien pour faire de la manutention. En revanche, si l’opérateur n’a pas plus de manutention à faire, son exosquelette peut être une gêne, donc il devra l’enlever. En revanche, demain, on parviendra à concevoir un exosquelette qui assistera la personne qui est en train de bouger et qu’il ne sera plus ressenti comme une gêne, lorsqu’elle ne fera rien.
L.D. Il sera de plus en plus compact, de plus en plus léger, de plus en plus confortable, avec plus ou moins de puissance. Mais il sera toujours connecté avec une intelligence artificielle au service de l’humain. Sur la base du machine learning, chaque utilisateur pourra mieux analyser ses mouvements, car on n’a pas tous la même façon de se mouvoir et en fonction de l’analyse d’une intelligence artificielle, l’exosquelette sera capable de fournir un confort, une assistance plus adaptée à la personne.