Exosquelette : comment faire le bon choix ?

Pour cette 28e édition de MP L’Emission nous nous sommes intéressés aux exosquelettes. Il s’agit d’appareils qui assistent le corps humain afin de réduire la fatigue au travail.

Comment choisir son exosquelette ?

Car vous découvrirez qu’il en existe plusieurs modèles. Quelles sont les conditions pour l’intégrer dans son entreprise. Et quels bénéfices peut-on en tirer.

C’est à découvrir dans “Machines Production L’Émission”.

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Décryptage

Nous recevons comme invités :

Yonnel Giovanelli, expert en nouvelles technologies d’assistances physiques à la SNCF
Louis Darfeuille, responsable commercial pour la France de German Bionic

Sur notre plateau de Boulogne-Billancourt, ils évoquent :

      • Les différents types d’exosquelettes
      • Les avantages et inconvénients
      • Comment bien choisir son exosquelette
      • Comment l’intégrer dans son entreprise
      • La formation des salariés
      • Les prochaines évolutions technologiques

 

Quels sont les différents types d’exosquelettes ?

Yonnel Giovanalli. On peut qualifier les exosquelettes en fonction de leur type d’assistance, par exemple passif ou actif, et en fonction de leur structure. S’ils sont rigides ou souples.  Aussi, on peut les qualifier par rapport à leurs fonctions, par exemple un exosquelette pour la manutention, un autre pour assister l’opérateur qui aurait les bras levés au-dessus de la tête. On peut les qualifier par rapport aux articulations aussi.

Pouvez-vous nous en dire plus sur la différence entre un exosquelette passif et actif ?

Y. G. Un exosquelette actif va être motorisé, donc il y a une source d’énergie, un système qui permet de déterminer quand assister l’opérateur, et quel serait son niveau d’assistance, entre autres. Cela peut être un moteur ou un vérin. Quant à l’exosquelette passif, celui-ci va être constitué de ressorts ou d’élastiques. Et donc en fonction des mouvements effectués, on va venir tendre le ressort ou l’élastique, lequel va ensuite restituer de l’énergie.

Décrivez-nous l’exosquelette German Bionic ?

Louis Darfeuille. C’est un exosquelette actif, donc robotisé. Pour le port de charges lourdes en entreprise, notre exosquelette va principalement protéger et maintenir le dos dans une position sécuritaire, et nos moteurs, qui sont situés au niveau du bassin, vont assister les utilisateurs quand ils vont se baisser, se relever ou faire du travail avec de la flexion prolongée.

En dehors du bien-être des salariés qui se fatigueront moins à la tâche, on imagine que l’exosquelette va accroître la productivité globale, limiter les absences, diminuer les coûts d’accidents. Vous confirmez Yonnel Giovanelli ?

Y. G. Je pense qu’il faut être vigilant dans le sens où la productivité ne doit pas être un objectif pour choisir un exosquelette. Si on fait ça, ça ne marchera pas. En revanche, qu’il y ait des conséquences et des bénéfices en lien avec la productivité, ça peut arriver. Je prends un exosquelette, j’augmente ma productivité et voilà. Donc ça, il faut éviter. Il peut y avoir éventuellement un retour sur la productivité, mais je pense que c’est au cas par cas.

L’exosquelette ne limite pas les risques de TMS ?

Le retour sur le risque TMS n’est pas prouvé scientifiquement, donc il faut encore attendre quelques années pour avoir plus de données. Par exemple à la SNCF, ce n’est pas parce qu’on va avoir un exosquelette qu’on va remplacer plus de semelles de frein. En revanche, effectivement, l’agent sera moins fatigué puisqu’il sera assisté sur le remplacement des semelles de frein, et réalisera un travail de meilleure qualité.

L. D. Comme notre exosquelette est motorisé, on va observer qu’en fonction des process, on va obtenir une productivité équivalente, voire des gains. On fait le même travail, sauf qu’on utilise moins d’énergie, dont c’est moins pénible et on peut être plus rapide, mais c’est au cas par cas et ça dépend des process. Il s’agit de rendre des tâches pénibles le moins pénible possible et le moins contraignant pour les manutentionnaires.

Quelles sont les démarches à suivre avant d’intégrer son exosquelette dans son entreprise ?

Y. G. La démarche d’intégration est fondamentale. On a beaucoup travaillé au niveau de l’Afnor, qui a publié une norme NF X35-800 en août 2023 permettant justement de proposer cette démarche d’intégration, qui part de l’étude d’opportunité jusqu’au REX, le retour d’expérience. Le plus important, c’est d’abord de se demander quelles sont les contraintes physiques, quelles sont les contraintes du poste. C’est une étude pour bien identifier et qualifier ces contraintes physiques, exprimer le besoin, rédiger un cahier des charges, regarder ce qui existe sur le marché. Puis, il faudra faire des tests, expérimenter sur de courtes périodes, puis de plus grandes périodes. Tout ce travail d’intégration de l’exosquelette doit être fait par un groupe pluridisciplinaire, constitué d’agents, de responsables des méthodes, d’ergonomes, de correspondants sécurité, de médecins, et bien entendu de toutes les instances représentatives du personnel.

Chez Germain Bionic, comment accompagnez-vous vos clients ?

L. D. Nous commençons par la qualification du besoin du client, pour cela nous demandons à nos clients de nous envoyer des vidéos, des photos de leur process, pour se projeter. On va leur demander le poids de ce qui est manipulé et la typologie de mouvement, les répétitions, afin de savoir si notre exosquelette va être pertinent ou non. Ensuite, on va se déplacer sur site afin de présenter notre dispositif, avec la participation du management, des opérateurs. Il faudra déterminer un potentiel référent exosquelette dans l’entreprise. C’est une personne qui est très importante pour que cette technologie innovante puisse être utilisée sur le long terme. Après, on procède à une phase de test, avec un certain nombre d’opérateurs pendant X minutes ou X heures, pour valider que l’exosquelette est compatible avec le process et qu’il offre bien des avantages et soulage bien l’opérateur. Notre exosquelette est équipé de capteurs, qui vont analyser en temps réel le process et l’ergonomie de chaque mouvement. Suite à cette phase de test, on sera capable de dire quels sont les process où notre exosquelette aura réellement un gain, où il va réellement protéger et soulager la personne, et quels sont ceux où notre solution n’est pas pertinente.

Comment bien choisir son modèle ?

Y.G. Je suis en train de terminer la création d’un outil de qualification d’exosquelettes, dans lequel on va trouver sept indicateurs et cinquante critères. Et j’ai déjà qualifié 114 exosquelettes. Dans cet outil de qualification, il y a toutes les caractéristiques techniques des exosquelettes, bien entendu, mais ça c’est un seul indicateur, et moi j’en ai six autres derrières. J’ai des indicateurs de complexité, d’assistance physique, d’utilisabilité, d’utilité objective, de sécurité et de compatibilité. La technologie exosquelette, même si elle a une dizaine d’années, cela reste une jeune technologie. Il y a encore beaucoup à faire.

Comment forme-t-on les salariés à utiliser un exosquelette ?

Y.G. Cela passe par une première prise de contact avec l’exosquelette. Et là, c’est tout l’intérêt d’avoir des fabricants et distributeurs qui adoptent un discours non pas commercial parce qu’on n’est pas là pour vendre mais faire essayer le produit et que ça se passe bien. C’est trouver quelque part une certaine partie de l’adéquation entre le produit et la personne. Une fois que cette phase de découverte est menée, vient une première formation hors situation de travail, pour justement apprendre à le mettre, à le régler, etc. Et après une formation en situation de travail, tout en sachant que quand on rajoute un exosquelette, de toute façon, il y aura une modification du travail, puisqu’on rajoute un élément complémentaire.

La formation chez German Bionic, comment se passe-t-elle ?

L.D. On a une équipe dédiée de formateurs qui prennent le temps d’accompagner l’entreprise et leurs opérateurs. Cela commence par une partie en salle, sans être dans les contraintes d’un atelier ou d’un entrepôt. Il s’agit alors de faire connaissance avec notre exosquelette, de le toucher, de le mettre, de l’enlever plusieurs fois, de trouver ses points de réglage, de confort. Il s’agit déjà de trouver des automatismes, parce que si on le met deux, trois, quatre fois, on crée un automatisme avec le dispositif. Puis, une fois qu’on est à l’aise, on va sur le terrain. Nous recommandons de commencer par de courtes sessions d’utilisation, entre une à trois heures maximums par jour ou tous les deux jours pour créer déjà une habitude, mais il ne faut pas y aller trop fort d’un coup. On va former surtout des référents qui vont devoir connaître par cœur le produit, afin qu’ils puissent intervenir si une personne se plaint d’un inconfort, d’une gêne, d’être trop serrée ou pas assez serrée, d’avoir trop de support, pas assez de support.

C’est déjà arrivé qu’un salarié ne se sente finalement pas à l’aise avec son exosquelette ?

L.D. Cela arrive. Il faut bien se rendre compte que le salarié va se retrouver à devoir travailler comme s’il portait un sac à dos. Et ce sac peut générer un peu de chaleur, du frottement, du poids en plus, jusqu’à gêner certains mouvements. Sauf que ce sac à dos, il peut aussi vous permettre de compenser une partie de votre pénibilité, de votre effort au travail. Il y a des personnes, avec lesquelles vous leur mettez l’exosquelette sur le dos et instantanément elles vont ressentir les bénéfices dans leur travail. Et d’autres qui vont éprouver trop de contraintes, qui vont se sentir gênées.

A quoi ressemblera la prochaine génération d’exosquelette ?

Y.G. On peut tout imaginer. On est au tout début de cette technologie, même si on a énormément progressé en l’espace de cinq ans. L’exosquelette est là pour assister l’humain qui est en train de bouger. Un exosquelette de manutention est un exosquelette qui fonctionne très bien pour faire de la manutention. En revanche, si l’opérateur n’a pas plus de manutention à faire, son exosquelette peut être une gêne, donc il devra l’enlever. En revanche, demain, on parviendra à concevoir un exosquelette qui assistera la personne qui est en train de bouger et qu’il ne sera plus ressenti comme une gêne, lorsqu’elle ne fera rien.

L.D.  Il sera de plus en plus compact, de plus en plus léger, de plus en plus confortable, avec plus ou moins de puissance. Mais il sera toujours connecté avec une intelligence artificielle au service de l’humain. Sur la base du machine learning, chaque utilisateur pourra mieux analyser ses mouvements, car on n’a pas tous la même façon de se mouvoir et en fonction de l’analyse d’une intelligence artificielle, l’exosquelette sera capable de fournir un confort, une assistance plus adaptée à la personne.

Intervenants

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Yonnel Giovanelli

Expert en exosquelette

SNCF

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Louis Darfeuille

Responsable commercial

German Bionic

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Jérôme Meyrand

Machines Production

Rédacteur en Chef

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Sara Ahmadvand

Machines Production

Reporter/Chroniqueuse