Se former à l’impression 3D

Pour cette nouvelle émission de Machines Production, nous nous sommes intéressés à la formation aux technologies de la fabrication additive. L’impression 3D fera son entrée, pour la première fois, dans les WorldSkills, en France. La compétition nationale des métiers se déroulera du 14 au 16 septembre à Eurexpo Lyon. Les champions de France viseront ensuite un titre lors des mondiaux, en 2024, qui se tiendront également dans la capitale des Gaules. Pour cette 20e édition de MPLE, nous nous sommes penchés sur l’évolution de la fabrication additive dans l’industrie. Et surtout aux compétences qui sont nécessaires pour mieux la maîtriser.

C’est à découvrir dans “Machines Production L’Émission”.

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Décryptage

Nous recevons deux invités :

Pierre Cerveau, responsable des grands comptes chez Formlabs.
Julien Bajolet, responsable du pôle métallurgie à l’AFPMA, le pôle formation de l’UIMM et expert national adjoint aux WorldSkills pour le métier de la fabrication additive.
Sur notre plateau de Boulogne-Billancourt, ils évoquent :

      • Les compétences nécessaires pour maîtriser l’impression 3D
      • Le parcours pédagogique dans un centre de formation
      • La fabrication additive s’ouvre à la production série
      • L’arrivée de l’impression 3D aux WorldSkills 2023

L’impression 3D n’est pas une technologie qui soit très compliquée à maîtriser, surtout par rapport à des procédés soustractifs, tels que l’usinage CNC, car elle demande comparativement peu de connaissances. Pierre Cerveau pause d’abord les bases : « L’impression 3D, c’est un terme générique, mais qui englobe plusieurs technologies : le dépôt de fil, la résine avec la stéréolithographie et le frittage de poudre, qu’elle soit polymère ou métallique. » Néanmoins, chacune de ces technologies possède ses propres caractéristiques, prévient notre expert. « Avec l’impression stéréolithographie, on utilise des polymères thermodurcissables, des catégories de plastiques complètement différentes. Maîtriser ces matériaux, leurs caractéristiques, que ce soit un comportement mécanique ou en température, est vital pour bien utiliser ces outils sur les applications industrielles, prévient M. Cerveau. Au-delà des matériaux et des technologies, de l’utilisation des équipements, il y a aussi d’autres outils à maîtriser si on veut pleinement utiliser l’impression 3D, et quelque part bénéficier de son plein potentiel. » Des outils informatiques surtout, comme le design génératif ou l’optimisation topologique.

« Quand on fait du soudage avec un robot, on peut superposer les cordons de soudage et faire de l’impression 3D »

Au centre de formation et de conseil spécialisé dans les technologies industrielles, le management et les ressources humaines AFPMA, situé à Péronnas (Ain), la fabrication additive s’est ajoutée à l’offre des prestations, dans le cadre des formations diplômantes, comme les BTS conception et en usinage, « où le référentiel de l’Education nationale a intégré l’impression 3D », indique Julien Bajolet. Le centre s’est équipé, dans un premier temps, de quelques petites machines d’impression de pièces en plastique. Mais avant cela, l’activité du soudage a été un premier élément déclencheur, dont l’AFPMA est spécialisée. « Et quand on fait du soudage avec un robot, on peut superposer les cordons de soudage et faire de l’impression 3D », souligne le responsable soudage et fabrication additive de l’AFPMA.

Depuis trois ans, ce pôle formation, qui dépend de l’UIMM de l’Ain, a fait l’acquisition de machines de fabrication additive métal Desktop Metal et polymère Formlabs.

La conception, un point « extrêmement important »

Plusieurs niveaux de formation sont proposés à Péronnas. « Une journée de découverte pour juste comprendre la fabrication additive, qui s’adresse aussi bien aux étudiants, dirigeants et demandeurs d’emploi. La semaine découverte va associer une partie théorie tous les matins, et une partie pratique tous les après-midis pour imprimer des pièces. On lance les machines pour la nuit et tous les lendemains matins, on récupère nos pièces, c’est ce que j’appelle la moisson. On va récupérer tout ce qui a été imprimé, ou pas. Cette semaine de découverte sert de socle de base pour des parcours orientés vers les opérateurs ou les concepteurs », explique M. Bajolet, sur le plateau de MP L’Emission.

Pour notre invité, la conception reste un point « extrêmement important ». Car « la liberté de formes offertes par les technologies de fabrication additive est un avantage-clé par rapport à d’autres technologies. Le fait de se former sur la conception est vraiment primordial », insiste-t-il.

« Contrairement à l’injection plastique, il n’y a pas besoin d’un outillage, qui peut coûter très cher, des dizaines de milliers d’euros, voire des centaines de milliers d’euros parfois, pour produire des pièces, analyse Pierre Cerveau. Un entrepreneur pourra lancer sur le marché son nouveau produit avec un investissement initial plus modeste. Car si le produit en question s’adresse à un petit marché, l’injection plastique peut s’avérer un moyen inadapté pour ce type de production. » En effet, le moule imprimé en 3D devient une véritable opportunité. Car cet outillage coûtera bien moins cher à produire. « Et au niveau des temps de production, on est sur des jours au lieu de semaines », ajoute notre expert chez Formlabs, qui est venu sur notre plateau avec un modèle de moule, imprimé en 3D. Ce dernier « peut coûter aux environs d’une centaine d’euros comparé à un équivalent usiné dans la masse, qui lui, coûtera peut-être plus de 10 000 euros ».

 

« Avec une imprimante 3D contrairement à d’autres technologies, on n’a pas besoin d’opérateur devant la machine »

Justement, les parcours de formation ont-ils évolué pour s’adapter à la fabrication additive en production série ? « Pour faire de la production série, on est aussi obligé de parler avec l’ensemble de l’entreprise, répond Julien Bajolet. On n’est pas dans du prototypage, donc à un moment donné on va s’adresser à des acheteurs, on va parler avec la compta qui doit comprendre le coût de production associé à l’impression 3D. Parce ce qu’avec une imprimante 3D, contrairement à quelques autres technologies, on n’a pas besoin d’opérateur devant. Une fois qu’on a lancé la machine, on fait autre chose. Donc le coût et le taux horaire ne seront plus vraiment les mêmes que sur d’autres familles de machines de production. »

En France, le métier de la fabrication additive fera son entrée pour la première fois dans la compétition des WorldSkills, lors de la finale nationale, du 14 au 16 septembre à Lyon. Parmi les nouveaux fournisseurs, figure Formlabs. « L’introduction de la fabrication additive en tant que discipline dans les WorldSkills est vraiment un moment important car ça concrétise la discipline comme un métier à part entière et confirme le besoin véritablement de se former et de s’éduquer sur ce procédé de fabrication-là, évoque Pierre Cerveau, sur plateau de MPLE. C’est un privilège de pouvoir s’associer aux WorldSkills et d’aider à promouvoir cette technologie auprès des jeunes. »

« Formlabs, des machines compactes et faciles à déplacer »

C’est Julien Bajolet qui a choisi le constructeur américain d’imprimantes 3D pour qu’il fournisse le matériel nécessaire à la compétition lyonnaise. Car « le but, c’est d’avoir des machines relativement compactes et faciles à déplacer. Parce que on va créer un atelier sur mesure pour les jours de compétition, il nous fallait des machines fiables parce qu’il n’est pas envisageable qu’elles puissent tomber en panne en pleine compétition. D’autre part, je cherchais aussi un fournisseur capable de fournir à la fois les machines, les matériaux, et cela sur plusieurs technologies. »

Les épreuves comprendront plusieurs modules, allant de la technologie de fabrication additive par dépôts de fil, à la stéréolithographie et jusqu’au frittage de poudre polymère.

Les huit compétiteurs arrivés en finale ont été sélectionnés lors d’épreuves organisées dans cinq régions. « A J-1, c’est la préparation, explique Julien Bajolet. Ils viennent vérifier le matériel, le ring de la compétition en quelque sorte. Le jour-J, on part sur une journée complète de compétition. A la fin de la journée, on va commencer à faire des classements. »

AFPMA Responsable pôle métallurgie

Optimisation topologique

Il y aura cinq modules d’épreuves sur cinq demi-journées. « Le but étant que les machines tournent le plus possible. Par exemple, avec la stéréolithographie, on va avoir la production d’un outillage pour faire de l’injection plastique manuelle, avec l’utilisation d’une presse à main de notre partenaire HoliMaker, parce qu’encore une fois on veut du matériel qui soit facilement transportable », souligne M. Bajolet.

A cela s’ajoutera une épreuve de conception en lien avec l’optimisation topologique et le génératif design, où il sera question d’imprimer une pièce qui soit à la fois la plus légère et la plus performante possible.

Une fois la finale nationale achevée, c’est en septembre 2024 que les mondiaux seront organisés. Et cette année, c’est bien en France, et à Lyon, qu’ils auront lieu, où plus de 80 pays dans plus de 60 métiers s’affronteront. « Et l’objectif, c’est d’avoir les champions nationaux de chaque pays qui viennent participer à la compétition. Ça dure sur trois jours et demi, et les enjeux ne sont pas tout à fait les mêmes, parce que là, du coup, on a un champion du monde qui va être désigné », avertit M. Bajolet, qui espère que le pays raflera le maximum de médailles.

Intervenants

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Pierre Cerveau

FORMLABS

Responsable grands comptes

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Julien Bajolet

AFPMA

Responsable pôle métallurgie

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Jérôme Meyrand

Machines Production

Rédacteur en Chef

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Patrick Cazier

Machines Production

Rédacteur